mardi, novembre 07, 2006

Dépeçage d'une baleine à bec de Baird à Wada

N'ayant pas mis mon blog à jour depuis un bail, Je vais procéder petit à petit. Commençons par ma visite dans le port de Wada (département de Chiba) à la fin du mois de juillet.

Comme le titre de ce message l'indique, mon déplacement avait pour but d'assister au dépeçage d'une baleine. En effet, tous les ans, aux mois de juillet et d'août, la société Gaibô Hogei se voit autoriser la capture de 26 baleines à bec de Baird (Berardius Bairdii). Cette espèce se trouvant en dehors de la juridiction de la CBI, le gouvernement japonais se charge de la gestion de la chasse commerciale de cette baleine dans ses eaux territoriales.

C'est au début du 17e siècle que la chasse à la baleine aurait commencé dans la province d'Awa, au sud de la péninsule de Bôsô. Cette chasse s'y est organisée sous l'impulsion d'un petit seigneur local, Daigo Shinbê 醍醐新兵衛, avec la création en 1704 d'un groupe de chasse (kujiragumi) à Katsuyama, à l'entrée de la baie d'Edo. La baleine à bec de Baird ayant la faculté de plonger profondément et de rester sous l'eau longtemps, la technique de chasse aux filets n'a jamais pu être adoptée par le kujiragumi du clan Daigo. A la fin du 19e siècle, avec l'augmentation des bateaux circulant dans la baie d'Edo, le nombre de baleines s'approchant de Katsuyama a diminué, forçant les baleiniers à mettre momentanément un terme à leurs activités. Celles-ci n'ont repris qu'au début du 20e siècle, avec l'introduction des techniques de chasse dites norvégiennes et la relocalisation des installations à Wada, sur la côte Pacifique.

La veille du jour où je me suis rendu à Wada, un mâle d'environ 10 mètres pour 10 tonnes avait été capturé par l'un des deux baleiniers opérant pour Gaibô Hogei. La coutume locale veut que l'on laisse la baleine dans le port pendant une nuit (en ayant pris la précaution d'extraire les intestins afin d'éviter à la chair de se putréfier) avant de la dépecer le lendemain matin. La capture et l'heure du dépeçage de la baleine sont annoncés par le biais du site web de la société Gaibô Hogei.

Il faut environ 3 heures aux quelques 30 employés de Gaibô Hogei pour dépecer l'animal et réduire en blocs la viande et le lard. Parmi eux, on compte un écorcheur expérimenté et deux apprentis dont la tâche est de découper la baleine. Il s'agit d'un travail nécessitant beaucoup de dextérité et de savoir-faire. Il faut plusieurs années d'apprentissage avant de pouvoir maîtriser ce métier. L'intégralité de la baleine est utilisée : la viande et le blanc pour la consommation humaine ; les os, les viscères et le sang comme engrais. Une partie de la viande est vendue le jour même à la population locale ainsi qu'à des restaurants et des hôtels de la région.

La saison de chasse ne durant que deux mois, la majorité des employés sont réaffectés dans des usines de transformation des environs pendant le reste de l'année. Une personne du ministère de l'Agriculture, des pêches et des forêts est mandatée sur place pour mesurer la baleine et faire divers prélèvements. Ces données servent à la gestion des populations de baleines de Baird.

Après le dépeçage, je me suis rendu dans un restaurant local où j'ai pu m'entretenir avec le patron (du restaurant). Celui-ci m'a expliqué que la volonté de Gaibô Hogei de jouer la transparence en invitant les gens à assister au dépeçage des baleines attirait particulièrement l'attention des médias. Ces derniers en profitent cependant pour faire du sensationnel en mélangeant la chasse scientifique japonaise en Antarctique et les modestes activités des baleiniers de Wada.
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