samedi, novembre 17, 2007

Petit point sur l'actualité baleinière

Alors que malgré un soit disant report, la campagne de chasse scientifique japonaise en Antarctique ne devrait pas tarder à débuter avec le prochain départ de la flotte du Nisshin-maru depuis le port de Shimonoseki, il est intéressant de se pencher sur ce qui a été dit ou écrit ces derniers jours à ce sujet aux quatre coins du monde.

Commencons par le Japon où le programme de recherche relatif aux rorquals de Minke (Balaenoptera acutorostrata) au large du port de Kushiro (département de Hokkaidô) s'est terminé à la fin du mois dernier. Ce programme prévoit la capture annuelle de 60 animaux dans un rayon de 50 miles nautiques autour de Kushiro, notamment pour étudier le régime alimentaire du petit rorqual et sa place dans l'écosysteme nord pacifique.
Selon le quotidien Mainichi, les quatre baleiniers n'ont réussi qu'à capturer 50 rorquals du fait de mauvaises conditions climatiques qui ont obligé les navires à rester au port pendant un tiers de la période de recherche (qui allait du 10 septembre au 31 octobre).
Toutefois, les premiers résultats de ce programme aurait mis en avant le fait que les préférences alimentaires des rorquals de Minke évoluent en fonction de leur âge. Ainsi, les jeunes rorquals n'ayant pas atteint l'âge adulte (moins de 6 mètres) se nourriraient principalement de colin d'Alaska (Theragra chalcogramma), alors que les animaux adultes se nourriraient surtout d'anchois japonais (Engraulis japonica). A ce sujet, le professeur Katô Hidehiro de l'Université de Science et de Technologie marine de Tôkyô, qui dirige ces recherches a émis l'hypothèse selon laquelle les rorquals de Minke pourraient migrer selon des routes différentes en fonction de l'évolution de leurs préferences alimentaires au cours de leur vie.
Les résultats de ce programme seront examinés à l'automne prochain lors d'une réunion de revue de la CBI que le Japon souhaite organiser sur son sol.

Toujours au Japon, de la viande de baleine frite (tatsuta-age) a été servie lors de repas scolaires le 8 novembre dernier dans la ville de Nagato (département de Yamaguchi). Cette région où la chasse à la baleine a connu son essor durant la période d'Edo, conserve encore de nos jours de nombreux patrimoines culturels tels que des stèles funéraires dédiées aux cétacés et des chants baleiniers hérités de cette pratique.
De même, la consommation de viande de baleine y était très répandue jusqu'à ce que le moratoire sur la chasse à la baleine entre en vigueur en 1987. De crainte que cette coutume alimentaire ne disparaisse, l'Association pour la transmission de la culture culinaire baleinière de Nagato - Ôtsu a été créée en 2002 à l'occasion de la tenue de la réunion plénière de la CBI à Shimonoseki, dans le même département.
Le Mainichi explique que les collectivites locales telles que Nagato peuvent acheter de la viande de baleine à l'Institut japonais de recherche sur les cétacés (ICR) pour un tiers du prix habituel. Selon le même institut, la quanité de viande utilisée pour les repas scolaires aurait été de 160 tonnes l'année dernière, marquant une progression annuelle de 20 pourcents.
La viande de baleine a la qualité d'offrir une importante source de proteines animales pour une faible teneur en graisses et cholestérol comparée aux autres viandes (bœuf, porc, poulet).

En Australie, à quelques jours des élections législatives qui doivent se tenir le 24 novembre prochain, la question de la chasse à la baleine est devenue l'un des enjeux de la bataille électorale entre le parti conservateur au pouvoir et les travaillistes. Ceci s'explique par le fait que ce pays est un ardent opposant de la chasse baleinière et que l'industrie du tourisme baleinier (whale-watching) est y est très lucrative.
Le leader du parti travailliste, Kevin Rudd aurait déclaré son intention d'envoyer un navire de la marine pour surveiller, voire stopper les opérations de la flotte baleinière japonaise en Antarctique. Bien que les conservateurs soient également farouchement opposés à la chasse à la baleine, ils sont contre la proposition de M. Rudd.
Outre le fait que le Japon est un important partenaire économique de l'Australie, l'envoi de navires de l'armée dans la zone du Traité pour l'Antarctique serait une infraction à ce même traité. L'Australie violerait donc ainsi le droit international alors que les opérations de chasse scientifique japonaises sont tout à fait en accord avec la Convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine.
Par ailleurs, le Traite pour l'Antarctique gèle les revendications territoriales, ce qui fait que le Japon ne reconnaît pas celles de l'Australie sur une partie du continent antarctique. Le sanctuaire baleinier que les Australiens ont mis en place dans leurs zone d'exclusivité économique en 1999 n'est donc pas valable dans cette partie du monde.

Le groupe de presse australien ABC a récemment publié un article dans lequel il est dit que les chercheurs de ce pays ont développé ou seraient sur le point de mettre au point une technique permettant de déterminer l'âge des baleines à l'aide de bouts de peau qu'elles laissent en faisant des bonds (breaching) hors de l'eau. L'article est en fait assez vague et laisse plutôt comprendre que cette technique ne permet pour l'instant que de savoir si l'on a affaire à un jeune ou à un adulte. Le Professeur Peter Harrison de l'Université de Southern Cross déclare qu' "il est préférable de savoir approximativement l'âge d'une baleine vivante plutôt que l'âge exact d'une baleine morte". A cela, le directeur général de l'ICR (Institut japonais de recherche sur les cétacés), Morimoto Minoru répond qu' "il est de la plus grande importance d'obtenir les meilleures données scientifiques possibles pour assurer un régime de gestion robuste et durable de la chasse baleinière commerciale".
En fait, les deux parties s'opposent sur la finalité des recherches conduites. D'un côté, l'Australie s'oppose à la chasse baleinière et donc à la collecte de données par le biais de méthodes dites létales. De l'autre, le Japon cherche à obtenir des informations précises à l'aide de techniques létales et non-létales afin de permettre la reprise d'une chasse à la baleine commerciale de manière réglementée et durable.

Dans le même article, Mick McIntyre de l'IFAW (Fond international pour les animaux) déclare que "les baleiniers vont se concentrer sur les plus grosses baleines, qui dans le cas des baleines à bosse sont les femelles en âge de se reproduire". Ceci est on ne peut plus faux. Les animaux capturés dans le cadre des programmes de recherche scientifique japonais sont déterminés de manière aléatoire de façon à obtenir les données les plus fiables statistiquement. C'est pour cela que des rorquals de Minke de moins de 6 mètres (n'ayant pas atteint l'âge adulte) ont été capturés dans le cadre des recherches menées au large de Kushiro (voir plus haut)
Ce responsable de l'IFAW fait donc sciemment de la désinformation pour provoquer une réaction de dégoût chez les gens.

L'opposition devrait devenir de plus en plus forte dans les semaines qui viennent. L'ONG Greenpeace a d'ores et déjà déclaré qu'elle traquerait la flotte japonaise depuis les côtes nipponnes avec l'un de ses navires, l'Esperanza.
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